dimanche 14 septembre 2025

RÉSEAUX SOCIAUX ! QUAND NOS VIES SE TRANSFORMENT ....

 

Réseaux sociaux. Vivre sous le regard permanent des autres : quand nos vies se transforment en “Truman Show”

J’ai 41 ans. Je ne suis pas de la génération née un smartphone à la main, et je dois l’avouer : je fréquente peu les réseaux sociaux. J’y passe parfois, distraitement, par curiosité ou par nécessité professionnelle. 

 Et chaque fois, je ressors avec le même malaise : ce besoin inépuisable de se montrer, de s’exposer, de s’afficher, comme si vivre ne suffisait plus, comme si exister n’était plus possible sans l’œil d’un public virtuel.

On nous présente les réseaux comme des lieux de partage.

 Mais de quel partage parle-t-on ? Partager un repas, une promenade, un événement heureux, c’était autrefois s’asseoir ensemble, lever son verre, échanger des regards. 

Désormais, “partager” consiste à photographier son assiette pour la publier, à filmer sa sortie jogging, à poster un sourire figé devant une tasse de café.

 On ne partage que soi. On s’en fou des autres, il n y a plus que sa petite personne. Le règne du « Moi je », « Regardez-moi ».

Nous assistons à une mise en scène généralisée de la vie quotidienne. Mariages, naissances, vacances, rentrée des classes : tout devient contenu. 

Tout doit être immortalisé, pas tant pour soi que pour les autres – ou plutôt, pour une foule d’inconnus.

Narcissisme ou insécurité ?

Il est facile de crier au narcissisme, à l’ego surdimensionné. Mais il y a peut-être autre chose. 

Ce besoin de se montrer traduit aussi une forme d’insécurité : “Si je ne poste pas, est-ce que j’existe vraiment ?” Dans un monde saturé d’images, chacun veut s’assurer d’être vu.

 Comme si la valeur d’une expérience se mesurait désormais au nombre de likes qu’elle récolte.

Les réseaux ont déplacé la frontière de l’intime.

Ce qui relevait autrefois du cercle familial – la première dent d’un enfant, la photo de classe, les repas du dimanche – est livré au regard du voisin, du collègue, de l’inconnu de passage. 

Non pas dans l’intention d’informer, mais dans celle d’être validé. La reconnaissance sociale se traduit en emojis et en cœurs rouges.

L’influenceur n’est pas la cause, mais le symptôme exacerbé de cette logique. Il vit de son exposition, il transforme sa vie en spectacle permanent, en vitrine marchande.

 Derrière un coucher de soleil ou un sourire travaillé se cache la recherche de partenariats, de revenus publicitaires.

 L’économie de l’attention n’a rien d’immatériel : elle se monétise, elle s’industrialise.

Mais ce qui frappe, c’est que même ceux qui ne sont pas influenceurs adoptent ces codes.

 Ils posent comme des mannequins, se filment comme des animateurs, mettent en scène leurs proches comme des figurants. 

La logique s’impose à tous : “je me montre, donc je suis”.

La question dérange : quelle différence entre vendre des photos intimes à des inconnus et exhiber chaque instant de sa vie quotidienne à des milliers de gens qui n’ont aucun lien avec vous ? 

 Dans les deux cas, il s’agit d’une marchandisation de soi. L’une est explicite, l’autre se pare des habits de la normalité, mais le mécanisme est semblable : exposer son corps, son intimité, son quotidien, en échange d’un retour symbolique ou financier.

Un voyeurisme réciproque

Car il ne faut pas oublier l’autre versant : le voyeurisme. Nous consommons ces images avec une avidité qui alimente la machine.

 Le succès des influenceurs tient moins à leur talent qu’à la curiosité des foules.

 On regarde par la serrure numérique de la vie des autres.

 Et plus ils s’exposent, plus nous voulons voir. Un cercle vicieux s’installe : plus d’exposition, plus de regard, plus de dépendance.

Sommes-nous devenus les figurants consentants d’un gigantesque Truman Show où chacun filme et regarde chacun ? Les réseaux ne sont pas seulement des outils de communication, ils sont devenus des dispositifs de surveillance volontaire. 

Chacun livre sa localisation, son état d’esprit, ses habitudes, ses enfants même – sans mesurer toujours la portée de ces données.

Ce besoin de visibilité traduit aussi une quête plus profonde. 

Dans une société où les repères s’effritent, où les liens communautaires se distendent, l’individu cherche un miroir. 

Il ne le trouve plus forcément dans sa famille, son quartier, son cercle d’amis proches. 

Alors il se tourne vers la foule anonyme des internautes, espérant y trouver validation, appartenance, reconnaissance.

Mais cette reconnaissance est superficielle, fragile, volatile. Elle repose sur des chiffres, des algorithmes, des modes. 

Elle ne construit pas, elle consume. 

Et lorsqu’elle disparaît, elle laisse un vide plus grand encore.

 

Pourquoi même la droite reprend ces codes

On aurait pu croire que certaines familles politiques, notamment à droite, s’opposeraient à cette logique d’exposition permanente. 

Or, on voit de plus en plus d’influenceurs conservateurs, identitaires, religieux, qui adoptent les mêmes mécanismes : mise en avant de leur quotidien, photos de leurs enfants, vidéos de cuisine ou de jardinage.

La logique des réseaux est un rouleau compresseur : pour exister, il faut entrer dans le jeu.

 Même ceux qui critiquent le système finissent par en utiliser les codes, parfois en l’adaptant à leur univers idéologique. 

Mais le problème reste le même : des enfants mineurs, qui n’ont rien demandé, se retrouvent exposés à des milliers, parfois des millions d’écrans.

Faut-il pour autant se résigner ? Non. 

Mais résister implique un effort conscient. Cela commence par un choix : celui de réserver certaines choses à l’intimité, de redonner un sens au mot “partager”. 

Partager, ce n’est pas poster. C’est donner de son temps, de son écoute, de sa présence.

On peut aussi réapprendre à vivre des moments pour eux-mêmes, sans le réflexe de les immortaliser pour autrui.

 L’émotion n’a pas besoin d’un filtre Instagram pour être réelle.

 Le rire d’un enfant, le goût d’un café, la beauté d’un paysage : tout cela peut exister sans témoin numérique et même, sans photo (combien de personnes voit-on désormais dans les concerts, dans les stades, téléphones à la main, avant même d’apprécier le réel, le direct..)

Enfin, il faut oser tourner le dos progressivement. Cela ne signifie pas disparaître, mais poser des limites.

 Refuser d’exposer ses enfants, décider de ne pas documenter chaque instant, garder pour soi des pans de vie. 

C’est une forme de liberté, une reconquête silencieuse.

 

Une folie douce mais dangereuse

Sommes-nous devenus fous ? Peut-être pas, mais nous jouons avec une folie douce qui risque de se transformer en aliénation.

 Quand tout devient spectacle, la vie perd sa substance. Quand tout doit être vu, plus rien ne se vit vraiment. La société de l’exposition permanente ne tombera pas demain.

 Mais chacun peut, à son échelle, s’en extraire partiellement. Non par mépris des autres, mais par fidélité à soi-même. 

Il ne s’agit pas de rejeter toute modernité, mais de redonner du poids à l’intime, au discret, à ce qui ne se montre pas.

À 41 ans, en observant ce déferlement, je ne peux m’empêcher de penser que l’une des plus belles résistances aujourd’hui est le droit à l’ombre. Le droit à l’oubli volontaire. 

Le droit de ne pas être vu.  

Et peut-être que l’avenir se jouera là : dans la capacité de quelques-uns à rappeler que la dignité humaine ne se mesure ni en abonnés, ni en clics, ni en likes.

 

YV

Photo : Pixabay (cc)
[cc] Article relu et corrigé (orthographe, syntaxe) par ChatGPT. Breizh-info.com, 2025, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine..



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