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sur l'immigration et la démographie
- Réponse à Terra Nova | 310
000 nouveaux immigrés par an d'ici 2040 pour « maintenir notre modèle
social » ? Retrouvez l'éclairage de l'OID sur les biais de cette étude
- Regroupement familial |
Le rapporteur du budget immigration, Charles Rodwell, propose un «
moratoire ». Quel est le droit, quels sont les chiffres ? Notre
décryptage
- Royaume-Uni | Le
Premier ministre annonce vouloir réduire
significativement l'immigration | Les explications de l'OID sur ce
virage et la situation britannique
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Réponse à Terra Nova | 310
000 nouveaux immigrés par an d'ici 2040 pour « maintenir notre modèle
social » ? Retrouvez l'éclairage de l'OID sur les biais de cette étude
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Le 12 mai dernier, le think-tank Terra Nova a publié une note intitulée « Les travailleurs immigrés : avec ou sans eux ? »,
qui entend « propose[r] une réflexion lucide sur la place des immigrés
dans l’économie française aujourd’hui et demain ». Elle est signée par
l’essayiste Hakim El Karoui et l’économiste Juba Ihaddaden.
La note arrive à la conclusion, très médiatisée, selon laquelle la France devrait recevoir « 310 000 nouveaux immigrés par an à horizon 2040-2050 pour stabiliser la population et maintenir notre modèle social ».
Pourtant, l'analyse et les calculs se fondent sur plusieurs approximations et erreurs méthodologiques qui aboutissent à des contre-vérités.
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Pour consulter la publication de Terra Nova :
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Afin de réaliser leurs modélisations des besoins de flux migratoires à venir, les auteurs postulent que « le taux d’activité de la population immigrée est le même que celui de la population française des 15-64 ans ».
Il s'agit d'un premier biais majeur, de nature à dévier l'ensemble des résultats des calculs. En effet, il se trouve que le taux d'activité des immigrés est inférieur de cinq points à celui des personnes sans ascendance migratoire (INSEE 2023), ce qui rend caduques les résultats proposés.
Par ailleurs, l'indicateur réellement utile est le taux d'emploi, et non le taux d'activité (qui décompte notamment les chômeurs parmi les actifs). À ce titre, les chiffres sont plus éloquents encore puisque les étrangers extra-européens – seule catégorie réellement concernée par les politiques migratoires – ont un taux d'emploi de 56% seulement, soit 14 points de moins que les Français (Eurostat 2024). Cette disparité s'accentue pour ceux arrivés plus récemment, chez qui le taux d'emploi se porte à 42% (Eurostat 2024).
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Les étrangers extra-européens viennent assez peu dans l'objectif formel de travailler. Ainsi, un seul titre de séjour sur 10 actuellement valides en France a été délivré pour motif économique (Ministère de l'Intérieur).
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Plus étonnant encore, l'étude cherche également à prouver que « les immigrés financent la protection sociale » en se fondant sur « le cas de la Seine-Saint-Denis ».
Evidemment, cette idée se fonde sur deux omissions majeures :
- D'une part, la Seine-Saint-Denis comptait 69% d'habitants non-immigrés en 2021 (INSEE), ce qui signifie que les statistiques départementales ne disent rien de la contribution spécifique des immigrés au financement de la protection sociale.
- D'autre part, le calcul brandi par Terra Nova, prend explicitement en compte les cotisations d'entreprises dont les salariés... ne vivent pas dans le département, faussant d'autant la démonstration générale.
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Au contraire de ce qu'avancent les auteurs, le rôle actuel de l'immigration dans le financement des prestations sociales n'est pas positif. En écartant les prestations de retraite, liées à l'âge, et les
allocations chômage, qui concernent davantage les immigrés mais sont la
contrepartie de cotisations : les immigrés perçoivent en moyenne deux fois plus de prestations sociales que les personnes sans ascendance migratoire ( INSEE 2019).
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Le fait que les immigrés trois fois plus souvent en situation de pauvreté que les non-immigrés ( INSEE 2021), cumulé à leur faible taux d'emploi, ne plaident pas pour une contribution positive aux finances publiques.
En matière de contribution au système de santé français, les auteurs
évoquent l'importance des « médecins étrangers » pour maintenir à flot
le système de santé avant de donner les chiffres des... « médecins à
diplômes étrangers ». Or, de nombreux Français sont diplômés d'universités étrangères.
Surtout, l'approche de ce sujet omet une réalité structurante : les
immigrés et personnes nées à l'étranger sont surreprésentés dans le
recours aux soins et sont, en moyenne, en moins bonne santé que les non-immigrés.
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L'autre argument des auteurs tient dans la contribution présumée de l'immigration au maintien du « ratio de soutien entre actifs et inactifs à un niveau raisonnable (…) qui permette de pérenniser notre modèle social », dans un contexte de crise de la fécondité et du système de retraite.
Or, même dans un scénario hypothétique où l’immigration reçue
présenterait des niveaux d’activité et d’emploi satisfaisants (ce qui ne
correspond nullement à la situation de la France) : il s’agirait d’une course sans fin, vouée à reprendre dès que les actifs importés atteindraient l’âge de la retraite.
Les Nations unies, dans un exercice de projection
de la population mondiale mené en 2000, ont estimé les flux migratoires
qui seraient nécessaires pour stabiliser le rapport entre population
d’âge actif et de plus de 65 ans dans les pays développés. En France, un
tel objectif aurait nécessité une immigration nette de… 90 millions de personnes sur la première moitié du XXIe siècle.
À ce sujet, le chercheur néerlandais Jan Van de Beek évoque une « pyramide de Ponzi démographique ».
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En outre, la note ne présente aucune alternative au recours à l'immigration pour pourvoir les emplois, alors même que la France compte un nombre significatif de personnes ni en emploi, ni en études, ni en retraite (dont 1,7 millions d'immigrés en 2021 | INSEE) qui pourraient, sans nouveaux flux entrants, occuper lesdits emplois.
Enfin, et même dans la projection abstraite d’une immigration largement au travail : une économie moderne devrait se garder des effets corrosifs d’une dépendance trop marquée à la « main-d’œuvre étrangère » peu qualifiée. En effet, celle-ci peut devenir un puissant élément de désincitation à l'investissement et à l'innovation, voué à peser négativement sur les secteurs les plus exposés à la concurrence internationale.
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Retrouvez la tribune de Nicolas Pouvreau-Monti dans le Figaro :
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Regroupement familial |
Le rapporteur du budget immigration, Charles Rodwell, propose un «
moratoire » | Quel est le droit, quels sont les chiffres ? Notre
décryptage
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Dans une tribune publiée par Le Figaro le lundi 12 mai, le député des Yvelines Charles Rodwell, co-rapporteur du budget Immigration, Asile et Intégration à l'Assemblée nationale, évoque la nécessité d'« assécher » les voies d'immigration autres que celles liées au travail.
Dans cette perspective, et tout en relevant les obstacles posés par les
actuelles jurisprudences de la CJUE et de la CEDH, le rapporteur propose
notamment la mise en place d'un « moratoire » sur le regroupement familial, en vue d'une réforme plus structurelle : « À terme, celui-ci ne devrait être possible que pour les étrangers ayant vécu, travaillé et contribué à notre richesse nationale pendant au moins cinq ou même dix ans » .
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Dans sa globalité, l'immigration familiale a représenté 90 000 premiers titres de séjour parmi les 336 710 nouveaux titres délivrés en 2024, soit 27% environ. Elle a été le deuxième motif d'octroi de primo-titres de séjour l'an dernier, et reste le premier motif parmi l'ensemble des titres en cours de validité au 31 décembre dernier ( Ministère de l'Intérieur).
Au sein de celle-ci, le regroupement familial concerne uniquement les ressortissants étrangers non-européens, en situation régulière, qui souhaitent faire venir leurs conjoints et leurs enfants mineurs. Il est inclus parmi parmi les 35 000 titres « Membre de famille » accordés l'an dernier (en augmentation de 3,2% par rapport à 2023 | Ministère de l'Intérieur).
Il importe notamment de distinguer cette procédure de la catégorie « Famille de Français », qui donne
la possibilité à des conjoints, parents ou enfants d'un citoyen
français de le rejoindre sur le territoire. Elle a représenté 40 000
nouveaux titres en 2024 ( Ministère de l'Intérieur).
La France est, à ce titre, le pays d'Europe occidentale dont l'immigration est la plus liée aux différents motifs familiaux.
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Pour que
sa famille soit éligible au regroupement familial, l'étranger
extra-européen présent sur le territoire doit répondre à plusieurs
critères :
- Toucher un revenu de 1 801,80 euros / mois (niveau du SMIC brut) sur les 12 derniers mois précédents la demande ;
- Vivre dans un logement répondant à certaines conditions de salubrité et d'équipement, notamment en termes de surface ;
- Se conformer aux principes essentiels qui régissent la vie familiale en France (monogamie, égalité hommes / femmes ...).
Les critères de regroupement familial en France sont moins exigeants que dans d'autres pays. L'Allemagne requiert une maîtrise minimale de sa langue ; le Danemark que les demandeurs n'aient pas perçu d'aides de l'État pendant 3 ans.
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Retrouvez l'intervention de Nicolas Pouvreau-Monti sur CNews :
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Royaume-Uni | Le Premier ministre annonce vouloir réduire significativement l'immigration : les explications de l'OID sur ce virage
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Dans un revirement stratégique notable, le Premier ministre travailliste Keir Starmer a dévoilé, la semaine dernière, un livre blanc présentant une série de mesures visant à durcir la politique migratoire du Royaume-Uni.
Ces annonces et le discours qui les a suivies marquent sa volonté
affichée de « reprendre le contrôle des frontières », afin d'écarter
le « risque de devenir une île d'étrangers, et non une nation qui avance ensemble ».
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Pour consulter l'ensemble des mesures du gouvernement britannique :
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Il souhaite notamment « inverser la tendance à long terme d’augmentation des recrutements internationaux au détriment des compétences et de la formation » et mettre en œuvre les politiques publiques nécessaires pour amener les non-immigrés à occuper les emplois non pourvus, plutôt « qu'importer » de la main d'œuvre à cette fin.
Parmi les dispositifs annoncés figurent :
- La révision à la hausse des conditions d'obtention de visas de travail, d’études et de regroupement familial, afin
de limiter les arrivées jugées non prioritaires pour l’économie
britannique. Les exigences de maîtrise de la langue seront également
durcies et étendues à de nouveaux types de titres.
- Une attention plus
forte sera portée à la qualité des profils des demandeurs.
- L'augmentation de la période nécessaire pour accéder au statut de résident permanent,
portée de cinq à dix ans afin d'encadrer davantage l’installation
durable des immigrés sur le territoire. Une exception demeurera pour les
personnes apportant une « contribution réelle et durable à l'économie
et à la société ».
- Le renforcement de la lutte contre les entrées irrégulières sur le territoire et la facilitation des expulsions de nombreux immigrés en situation irrégulière (en particulier ceux coupables de crimes et délits).
Ces orientations marquent une inflexion claire dans le discours du Parti travailliste, qui, sous la pression de l'opinion publique et de l'échec des actuelles politiques migratoires, souhaite se repositionner. Elle arrive alors que le Royaume-Uni a récemment accueilli une quantité importante d'immigrés peu qualifiés à des fins de travail, et que cette stratégie ne s'est pas révélée aussi bénéfique qu'espéré.
Durant les 4 années et demi ayant suivi le Brexit : une immigration nette de 2,5 millions de personnes a été reçue au Royaume-Uni.
Cette hausse est d'autant plus exceptionnelle qu'elle vient
exclusivement de l'immigration extra-européenne, dans la mesure ou le solde migratoire des citoyens de l'UE est négatif au Royaume-Uni sur cette période.
Se posent ainsi d'importantes questions économiques et sociales. Le
pays a notamment dû construire 1,19 millions de logements pour
accueillir ces nouvelles populations. Malgré les efforts consentis, la
pression sur le parc immobilier a renforcé la crise du logement.
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Retrouvez l'intervention du Center for Policy Studies lors du colloque OID :
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L'ensemble de ces éléments étaient évoqués dans l'intervention de Karl Williams, directeur des recherches du Center for Policy Studies (l'un
des plus importants think-tanks britanniques) à l'occasion de notre
colloque international organisé par l'OID le 20 novembre dernier.
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Retrouvez la vidéo explicative de l'OID concernant le bilan migratoire du Royaume-Uni depuis le Brexit :
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Élus
et responsables politiques, journalistes, décideurs économiques : vous
avez une question sur les sujets liés à l'immigration et à la
démographie ? N'hésitez pas à nous solliciter :
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