dimanche 18 février 2024

TRANSPORT ET GRÈVES : IL EST GRAND TEMPS OUVRIR LA CONCURRENCE À LA SNCF ........

 


 

 TRIBUNE LIBRE !

SNCF : les conditions d’une privatisation réussie

Suite à la grève des contrôleurs, la SNCF a annoncé qu’un train sur deux circulerait ce week-end. Il est temps de l’ouvrir à la concurrence.

 
Source : image générée par IA
 
Publié le 17 février 2024
 

Le principe de privatisation n’est ni bon ni mauvais en soi. Ce sont les conditions de sa réalisation qui en font un bon ou un mauvais choix.

Multiplier les opérateurs sur les lignes hyper rentables, comme la compagnie espagnole Renfe sur le trajet Paris-Lyon-Marseille, par exemple, ne pourra jamais développer le rail sur le territoire national. Au contraire, affaiblir les recettes de la SNCF en la laissant seule gestionnaire des lignes locales et secondaires, est le meilleur moyen pour que ces dernières ne soient plus exploitées ou ne vivent plus que sous perfusion d’argent public (abondé par les régions, les départements…).

Mais la privatisation des lignes secondaires est déjà en route : les régions PACA et Normandie ont déjà engagé le processus. Oui, mais avec toutes les chances réunies pour un échec en beauté.

D’abord, parce qu’aucun plan directeur de développement du rail n’a été élaboré ou n’est en cours d’élaboration. Ensuite, parce que nous nous dirigeons tranquillement vers une privatisation sur le mode concessionnaire et non open access.

Or, quels enseignements pouvons-nous tirer de l’expérience britannique ?

Le modèle concessionnaire choisi par nos voisins d’outre-Manche, malgré toutes les réussites de la privatisation, n’a ni permis de diminuer la charge qui pèse sur les finances publiques ni provoqué une baisse des tarifs pour les passagers.

 C’est logique, car le système concessionnaire remplace un monopole par un autre. 

C’est d’ailleurs le modèle open access que la France semble avoir choisi pour les lignes à fortes rentabilité comme Paris-Lyon-Marseille, alors pourquoi s’arrêter en si bon chemin et ne pas appliquer ce même modèle aux lignes secondaires, voire locales ?

 Parce que l’état des infrastructures et la rentabilité théorique seraient de nature à repousser d’éventuels acteurs privés ?

 

Quelques pistes de réflexion pour imaginer une privatisation intelligente…

Un schéma national de développement

Il est nécessaire d’établir avant tout un schéma national de développement de l’infrastructure du rail afin d’atteindre, à une échéance de 10 à 15 ans, un maillage de la quasi totalité des agglomérations françaises.

Rappelons qu’entre la nationalisation de 1938 et aujourd’hui, ce sont 16 000 km de voies ferrées qui ont été démolies au nom du « service public ». 

Il est impératif de reconstituer un maillage du territoire national permettant d’utiliser le rail pour se rendre d’une commune à une autre sans être obligé de transiter par Paris, ou de payer trois fois plus que le prix de ce même trajet en automobile.

 

Une société unique, mixte, de gestion des infrastructures

L’exécution et la gestion de cette infrastructure (réseaux et gares) devraient être confiées à une entité unique, nationale, afin d’éviter les redondances, d’assurer une totale interconnexion et de définir les priorisations.

Cette société serait renforcée sur la plan capitalistique par l’apport de capitaux privés (ce que les statuts de « SNCF gares et connexions » permet), y compris et surtout de la part des sociétés privées qui souhaiteraient être présentes sur le marché du rail.

 Ainsi, toute société privée désireuse d’exploiter un tronçon du réseau ferré français, se verrait tenue de participer au financement des investissements en devenant actionnaire de la société nationale. 

Cela n’est bien sûr pas exclusif, et si des sociétés non exploitantes voulaient investir dans le réseau, elles devraient pouvoir le faire.

Pour des raisons stratégiques, le contrôle de cette société devrait rester aux mains de l’État. 

Si, pour certains, cette idée pourrait sembler désuète ou anachronique, la réalité de certaines situations advenant chez certains de nos voisins devraient les amener à réfléchir sur le rôle que peut jouer un réseau ferré en cas de conflit.

Enfin, l’économie de cette entité serait assurée par les droits de péage versés par les exploitants. 

Actuellement, ces droits sont démesurément lourds. 

Cette situation est le fruit d’une gestion technocratique, d’un trafic exsangue et du quasi monopole des exploitants.

D’où les points suivants :

 

Une privatisation en open access

Pour les raisons évoquées précédemment, si nous voulons éviter la reconstitution de monopoles, qu’ils soient privés ou publics importe peu, tous les opérateurs qui le souhaitent devraient pouvoir exploiter une ligne. 

La société gérant les infrastructures devrait alors émettre des droits de trafic avec des créneaux horaires, sur le modèle de ce qui existe pour le trafic aérien. 

C’est la condition sine qua non pour que la concurrence joue son rôle.

 

Une diversification des matériels

Une des raisons pour lesquelles les trains régionaux coûtent aujourd’hui si cher est l’équipement imposé par la SNCF. 

Or, certaines dessertes peuvent être assurées par des matériels plus légers nécessitant des investissements moins lourds (Bluetram par exemple pour la réouverture de lignes locales dont les rails ont été démontés) ou des matériels anciens reconditionnés (comme Transdev sur la ligne Carhaix-Paimpol), et une gestion du personnel plus souple.

 

Développer le trafic marchandises

S’il est un point sur lequel les impératifs économiques et écologiques se rejoignent, c’est sur la nécessité de développer le trafic de marchandises par le rail. 

La solution la plus efficace et la plus rapide pour y parvenir serait d’ imposer de manière progressive le ferroutage ou transport combiné.

Cette mesure pourrait s’appliquer de manière progressive, d’abord sur le trafic en transit, puis sur des distances de plus en plus courtes, réduisant, à terme, l’usage du camion à un rayon de 100 km.

Outre la diminution de la pollution que le ferroutage engendrerait (les camions sont la première source de rejets de microparticules et de gommes), cette solution permettrait le désengorgement des infrastructures routières, le ralentissement de leur usure et la diminution des accidents routiers.

 Elle permettrait de créer un marché du fret ferroviaire propice à la baisse de ses coûts et donc du prix des droits de péage.

 Le développement de ce marché participerait à la rentabilisation de « SNCF gares et connexions ».

 

Conditionner l’octroi de droits d’exploitation des lignes à fortes rentabilité

Il s’agit ici de déterminer un principe de conditionnement de l’octroi de droits d’exploitation des lignes à fortes rentabilités (TGV, grandes lignes) à l’exploitation de lignes locales et régionales.

Par exemple, l’exploitation ou la réouverture de lignes locales ou régionales permettraient l’octroi de plus ou moins de « droits » (en fonction du niveau de non-rentabilité à court, moyen et long terme) sur les lignes à forte rentabilité. L’exploitation de ces lignes n’intéressant pas forcément l’exploitant, ces  « droits » pourraient être négociables sous forme de vente ou de location, et donc permettre d’améliorer la rentabilité des petites lignes sans faire appel à des subventions publiques.

 

Oui, la privatisation peut être vertueuse

Un dispositif tel que décrit précédemment permettrait de développer le rail par l’apport de capitaux privés dans la société gestionnaire des infrastructures. 

Plus de lignes, plus de communes desservies, plus de trains, plus de lignes transversales, plus de trafic marchandises, tout en garantissant le principe de continuité territoriale.

Il ne s’agit pas de privatiser seulement ce qui est rentable, mais de faire de la privatisation un élément de dynamisation du trafic ferroviaire, tout en soulageant les finances publiques, car ces dernières ne seraient, comme il se doit, engagées que dans les investissements et non dans le fonctionnement.

 

La belle entourloupe de l’hyperloop : comment la SNCF et des collectivités territoriales se sont laissé berner par Elon Musk

La startup Hyperloop One promettait de révolutionner les transports.

 Elle a mis la clé sous la porte le 31 décembre 2023.

 
Source : DeviantArt
 
Publié le 28 janvier 2024
 

Elon Musk est un génie, y compris pour faire prendre des vessies pour des lanternes.

 Depuis dix années, en s’appuyant sur sa réussite fulgurante (Tesla, SpaceX), il a réussi le tour de force de faire investir des centaines de personnes et des startups dans l’avenir du train « révolutionnaire » à très grande vitesse hyperloop (plus de 1000 km/h) circulant dans un tube partiellement sous vide d’air.

Mais l’objectif d’Elon Musk n’était peut-être que de faire rêver avec l’argent… des autres, c’est-à-dire le nôtre au travers des impôts et des taxes (la SNCF a aussi investi 80 millions d’euros dans cette belle folie en 2016, la métropole de Toulouse 5,5 millions, et la Région Nouvelle-Aquitaine, deux millions à travers le fond européens Feder).

 

Un dur retour à la réalité

Tout avait commencé en 2013, avec la publication par Elon Musk du célèbre Alpha Paper, un document de 52 pages open source dans lequel le milliardaire avait décrit son idée enthousiasmante.

Or, lui et ses collaborateurs s’étaient concentrés sur des points faciles à résoudre, tout en ignorant les obstacles techniques importants. La rentabilité a aussi été largement sous-estimée.

L’Alpha Paper d’Elon Musk tenait plus du projet étudiant ou d’une lettre au père Noël que d’une étude technico-économique solide.

Les rêveurs et les petits malins à la recherche de projets subventionnés ont sauté sur l’occasion en ignorant les impossibilités résultant des lois de la physique, notamment faire circuler des passagers dans un tube presque sous vide (un millième (un millibar) de la pression atmosphérique sur Terre qui est de 1000 millibars).

L’hyperloop était censé être un véhicule durable, ultrarapide et efficace composé de capsules en aluminium maintenu en l’air par un système de lévitation magnétique dans de longs tunnels à basse pression.

 Le concept séduisant devait transformer profondément l’industrie des transports.

Cependant, il avait déjà été imaginé par Jules Verne en 1891 qui, lui, vendait clairement du rêve dans ses livres, et le projet Swissmetro, proposé en 1974 et abandonné en 2009, ressemblait aussi déjà à celui d’Elon Musk.

Logiquement, dix ans et 450 millions de dollars plus tard, l’emballement initial a vécu devant les déconvenues techniques.

 Les milliers d’emplois vantés sur le papier se sont évaporés.

 Les tunnels n’en sont encore qu’au stade d’ébauche et la startup Hyperloop One, qui promettait de révolutionner les transports, est officiellement morte le 31 décembre 2023.

 

Arrêt total

Cette saga industrielle rocambolesque, qui a coûté cher, a fait fantasmer pendant une décennie un public restreint qui veut du rêve, et pas des études compliquées.

Il fallait alors penser autrement, être disruptif, s’ouvrir l’esprit, sortir de sa zone de confort, ce dont se moque la physique. Et quelques-uns se sont pris dans la figure le mur de la réalité qu’ils voulaient franchir allègrement au cri de « la technologie progresse, on va trouver bientôt, ayez confiance… ».

Il reste de jolies animations en musique sur écran et des images, c’est-à-dire rien.

Certains estiment encore aujourd’hui que cette gabegie financière était justifiée parce que l’idée avait un potentiel, et qu’il aurait été dommage de ne pas essayer.

Pour d’autres incorrigibles, l’hyperloop a simplement émergé trop tôt… ou trop tard, dans un contexte économique défavorable au développement de cette technologie.

 Il est difficile d’affronter la réalité et la physique.

 

C’était prévisible… et prévu !

Bien sûr, certains penseront qu’après coup, il est facile de dire maintenant que l’argent a été dilapidé, que ce projet était une idiotie, et que c’était prévisible dès le départ car il n’est jamais possible de s’affranchir des lois de la physique. 

Mais le besoin de rêver et l’effet d’aubaine permettant de créer des pompes à fric auront été les plus forts, tout comme pour le développement aberrant des éoliennes et autres panneaux photovoltaïques.

Héla, les fonds publics permettent aussi à des politiciens de faire vivre un petit monde d’obligés pendant un certain temps, grâce à des subventions accordées. Puis, quand le soufflé retombe, ce petit monde de profiteurs s’éparpille, ferme les startups, et recommence ailleurs pour vendre du rêve aux naïfs sur un autre projet bien emballé dans une belle animation.

Ainsi, certains font tout une carrière sur du vide, du vent, du rien, tant qu’il y a des subventions et de l’argent à prendre.

Ce projet d’Elon Musk était peut-être destiné uniquement à torpiller le TGV en Californie en le faisant passer pour ringard afin de mettre en péril les transports publics et californiens, et de mieux vendre ses voitures Tesla.

Au final, cet hyperloop est un immense flop, un hyper loupé, une escroquerie technico-intellectuelle. L’entourloupe de l’hyperloop aura quand même duré… dix ans et englouti en pure perte des centaines de millions d’euros, principalement d’argent public.

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