mercredi 21 février 2024

L' EXPULSION DE L' IMAM DU GARD MAHJOUB MAHJOUBI N' A RIEN D' ÉVIDENT .....;

 C' EST LA RÉPUBLIQUE !!!

 



« Drapeau satanique » : pourquoi l’expulsion de l’imam du Gard s’avère impossible (ou presque) ?

« Je vais être factuelle, Madame Mabrouk : il ne pourra pas être expulsé. » 

Ce mardi 20 février, au micro d’Europe 1, Linda Kebbab, fonctionnaire de police, dit tout haut ce que beaucoup redoutent.

 Depuis la diffusion sur les réseaux sociaux d’un prêche dans lequel Mahjoub Mahjoubi, imam de Bagnols-sur-Cèze (Gard), qualifie le « drapeau tricolore » de « drapeau satanique », la polémique enfle. 

Dès le 18 février, Gérald Darmanin a demandé « le retrait de son titre de séjour en vue de son expulsion du territoire ».

 « Aucun appel à la haine ne restera sans réponse » promet le locataire de la place Beauvau.

 Mais la bataille judiciaire pour son expulsion s’annonce déjà semée d’embûches. Explications.

 

Protection des étrangers

Le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est clair : un étranger qui réside régulièrement en France depuis vingt ans « bénéficie d’une protection quasi-absolue ». 

Il ne peut être expulsé du territoire que dans des cas très limités et très encadrés par le droit.

 L’imam Mahjoubi, installé en France depuis 1986 et bénéficiaire d’un titre de séjour valable jusqu’au 7 août 2029, jouit donc de ce statut très protecteur.

 Il ne peut faire l’objet d’une décision d’expulsion qu’en cas de « comportements de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de l’État, ou liés à des activités à caractère terroriste, ou constituant des actes de provocation explicite et délibérée à la discrimination, à la haine ou à la violence contre une personne déterminée ou un groupe de personnes » (article L. 631-3). 

 

Autrement dit, la justice, qui vient d’ouvrir une enquête pour apologie du terrorisme, devra déterminer si les propos de l’imam du Gard tombent sous le coup du droit des étrangers.

 Et c’est là qu’apparait la première difficulté.

En effet, d’un côté, la classe politique dans sa très grande majorité et de nombreux responsables du culte musulman, condamnent le prêche de l’imam d’origine tunisienne qui, outre sa sortie sur le drapeau « tricolore » qui n’a « aucune valeur auprès d’Allah », a été signalé par le préfet du Gard pour des propos problématiques sur les juifs, la place de la femme dans la société et pour une « approche extrémiste de l’islam ».

 De l’autre, Mahjoub Mahjoubi et son avocat plaident la « maladresse de langage », « le lapsus ». 

« En aucun cas dans mon parcours d’imam, je n’ai pensé une seconde que le drapeau français ou que la République étaient dérangeants.

 Bien au contraire j’ai toujours défendu ces valeurs » assure l’imam qui prétexte parler dans son prêche « du monde musulman et du football ». 

Or, en août 2022, le tribunal administratif de Paris avait pris en compte les excuses d’Hassan Iquioussen sur certains de ses propos passés pour ordonner la suspension - décision finalement cassée par le Conseil d’État - de son expulsion. 

Preuve donc que le caractère haineux des propos de l’imam du Gard ne sera pas nécessairement évident aux yeux des magistrats…

 

L’article 8 de la CEDH

Et quand bien même les troubles à l’ordre public, le caractère terroriste ou le l’appel à la haine seraient retenus, un autre obstacle juridique peut encore empêcher l’expulsion de l’imam.

 Il s’agit de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), ratifiée par la France en 1974, qui dispose que « toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale ».

 Et qu’il « ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale ».

 Comme le précise Guillaume Bernard, spécialiste des institutions joint par BV : « La portée réelle d'une décision de la CEDH, bien qu'elle influence le législateur national, est surtout symbolique et politique. » 

Invoqué par les avocats de la défense dans le cadre de l’affaire Iquioussen, le droit à la vie privée et familiale avait finalement été balayé d’un revers de main par le juge  du Conseil d’État qui considérait que les enfants d’Hassan Iquioussen étant « majeurs »,  ils « ne dépend[aient] plus de leur père » et que son épouse, de nationalité marocaine, « ne se trouv[ait] pas dans l’impossibilité de se déplacer au Maroc et de l’y rejoindre ».

 À l’inverse, dans le cadre de l’affaire Mahjoubi, selon nos confrères, l’imam du Gard est marié à une femme de nationalité française. 

Ses enfants, mineurs, sont de plus nés et scolarisés en France. 

Au vue d’une importante jurisprudence, il se pourrait donc bien que les tribunaux, au nom du droit à la vie privée et familiale, ne se prononcent pas en faveur de son renvoi du territoire français.

 

 Et ce, alors que 92 % des Français se déclarent pourtant favorables à l'expulsion, sans recours possible, des imams étrangers qui tiennent des prêches anti-français.

Gérald Darmanin a beau faire des promesses, l’expulsion de l’imam du Gard n’a donc rien d’évident. 

Et de longues semaines, si ce n’est mois, peuvent encore s’écouler avant que la justice ne se prononce au gré des recours dont Mahjoub Mahjoubi disposera.

 
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Clémence de Longraye

Journaliste à BV    https://www.bvoltaire.fr





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