lundi 27 novembre 2023

L' ÉTAT DÉPENSE UN " POGNON DE DINGUE " ! LES FONCTIONNAIRES CRÉENT DES NORMES ET LES NORMES ...........

 


 

« Les fonctionnaires créent des normes et les normes créent des fonctionnaires »

Point de vue. Jean Kircher réagit au nouveau plan du gouvernement visant à alléger les normes pour les PME.

 
Source : Flickr
 
Publié le 27 novembre 2023
 

C’est en Angleterre que sont apparus les premiers concepts HACCP suite aux nombreux problèmes d’hygiène rencontrés sur des produits alimentaires. 

L’origine étant que les salariés des entreprises alimentaires n’avaient pas le réflexe de se laver les mains avant d’opérer sur les lignes de production.

S’en est suivi un certain confort de travail pour les responsables qui, au lieu de se fâcher et risquer les conflits, pouvaient se contenter de se référer aux normes écrites que les salariés avaient eux-mêmes signées. L’autorité était remplacée par la formule : écris ce que tu fais et fais ce que tu as écrit….et signé. Donc le chef n’était plus le mauvais coucheur à cheval sur le travail bien fait mais s’abritait derrière le cahier des charges signé par le salarié.

 

De la normalisation à l’absurdisation

Plus tard, cette normalisation s’est installée à tous les étages des entreprises ou il devenait la règle de ne pas réfléchir mais d’exécuter sans discuter. On ne fonctionne plus en mode de résolution de problème mais en mode de satisfaction au système. Circulez, y a rien à voir…

Afin de faire fonctionner ce qui allait devenir une usine à gaz il fallait des exécuteurs de normes, donc formés dans les écoles et parfaitement capables d’appliquer strictement et sans réfléchir. Les Américains ont toujours eu pour principe qu’un bon produit était celui que le consommateur le plus bête consommait sans poser de questions. Donc standardisé, interchangeable et facile.

Dans les entreprises ont peu à peu disparu les contremaîtres, les chefs d’équipe et surtout les anciens qui avaient encore la compétence pour réparer une machine ou optimiser une ligne de production et surtout pour transmettre. À qui ?

Aujourd’hui, il n’y a plus rien à transmettre puisque tout est digitalisé et, en cas de bug il suffit d’attendre l’intervention des RoboCops de l’informatique.

 

De la bureaucratisation à la déshumanisation

C’est le règne du tableau excel et des webinaires où l’on veut vous apprendre à produire, former, gérer, vendre, exporter etc.

L’humain ? On s’en fout puisqu’il est interchangeable. Avec quand même le retour de bâton sous forme d’arrêts maladie à répétition, de revendications, de droits à tous les étages, de grèves ou d’émeutes. Normal que 16 millions de Français dépriment…

L’État est entré dans la même logique jusqu’à complètement étouffer toute initiative personnelle des députés, des maires ou des régions. 

La pieuvre est dirigée depuis les bureaux parisiens qui contrôlent les poissons-pilote que sont devenus les organismes de certification nombreuses et variées genre Mc Kinsey, les commissaires aux comptes, les fiduciaires dont le rôle est de veiller à ce que toutes les normes soient appliquées. Le tout secondé par les délégués internes syndicaux, sécurité, conformité, pénibilité, etc. Le Code du travail avec ses 3000 pages est en concurrence avec le code RSE avec seulement 1700 pages… Bientôt un délégué aux droits de l’Homme.

« En France, plus de 37 000 normes facilitent et sécurisent les échanges commerciaux, améliorent les performances des biens et des services, diffusent l’innovation, favorisent l’efficience et l’efficacité des entreprises. »

Voilà la définition Google de ce monstre administratif que notre écrivain-ministre de l’Économie veut changer ? Est-il sur la même planète que nous ?

 

Les fonctionnaires créent des normes et les normes créent des fonctionnaires

Surtout, comment peut-il faire ? 

On sait que les ministres sont prisonniers de leurs structures composées d’énarques et hauts fonctionnaires qui n’ont pas la moindre idée de ce qu’est un compte d’exploitation, et plus généralement la vie normale d’un Français moyen.

Prisonniers d’idéologues et d’appareils complètement sclérosés, nos dirigeants obsédés de garder leurs petits privilèges ne produiront jamais un grand patron en France qui ose renverser la table. 

Un patron, un visionnaire, un homme d’État….

On peut rêver…

  


ET AUSSI 


Bureaucratie : les aveux partiels d’un responsable

Jean-Pierre Jouyet, haut fonctionnaire français, livre un témoignage critique sur la bureaucratie. Mais les changements proposés manquent d’ambitions.

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Publié le 27 novembre 2023
 

Un article d’Alain Mathieu

 

Il est difficile de trouver un Français plus représentatif de nos hauts fonctionnaires que Jean-Pierre Jouyet.

Son CV accumule les plus hauts postes financiers : directeur du Trésor, la plus prestigieuse direction du ministère des Finances, chef du service de l’Inspection des Finances, le corps de fonctionnaires le plus influent, président de l’Autorité des marchés financiers, qui règlemente la Bourse, directeur général de la Caisse des dépôts et président de la Banque Publique d’Investissement, les « bras armés » de l’État dans l’économie.

Il a été en outre chef de cabinet du président de la Commission européenne Jacques Delors, directeur du cabinet du Premier ministre Lionel Jospin, secrétaire général du président de la République et ami François Hollande, ministre de Nicolas Sarkozy. 

Il a joué un rôle important dans l’ascension d’Emmanuel Macron à la présidence de la République, notamment en dénonçant une prétendue intervention de François Fillon pour faire accélérer par l’Élysée les poursuites judiciaires contre Nicolas Sarkozy. Il en fut d’ailleurs remercié par Emmanuel Macron qui le nomma en 2017, à 63 ans, ambassadeur de France au Royaume-Uni.

 

« Catholique de gauche », il se livre, sous le titre Est-ce bien nécessaire, Monsieur le ministre ? (Albin Michel-octobre 2023), à une étonnante et méritoire confession publique :

« J’étais plus intéressé par les règles qui s’appliquaient aux relations entre les administrations centrales que par celles qui s’appliquaient aux administrés […]. 

Je minimisais l’importance de la bureaucratie et son rôle souvent néfaste sur la bonne marche du pays […]. 

Maintenant que j’affronte seul la machine administrative je mesure l’astuce et la ténacité dont doivent faire preuve les usagers des services publics ».

Sa confession va jusqu’à signaler les mauvaises décisions qu’il a prises ou suscitées dans ses différents postes :

Pour assurer le succès de l’introduction de l’euro, il a recommandé des « augmentations de salaires aveugles et préventives » accordées aux salariés des imprimeries de la Banque de France qui menaçaient de faire grève.

Sur les 23 régions existant en 2015, 17 ont subi des fusions qui ont réduit leur nombre à sept. 

Par la suite, « les dépenses de ces sept régions fusionnées ont augmenté trois fois plus vite que celles des six autres régions non fusionnées ».

 

Les réformes décidées par le pouvoir politique rencontrent l’obstruction systématique des hauts fonctionnaires, qui détiennent en fait le pouvoir

La fusion des directions des Impôts et de la Comptabilité publique « supposait de mettre fin aux doublons entre directeur départemental des impôts et Trésorier-payeur général. 

Il faut bien reconnaître qu’aujourd’hui ces deux fonctions coexistent toujours ».

Sa longue expérience administrative lui a fait constater de nombreux gaspillages de l’argent public.

« L’État dépense un « pognon de dingue » ». 

Pour le gouvernement d’Élizabeth Borne, 565 conseillers, soit 13 par ministre, alors qu’en 2017 Emmanuel Macron n’en voulait pas plus de cinq par ministre. 

Ils sont assistés par 2200 huissiers, secrétaires, chauffeurs, cuisiniers […] 

Il suffirait de 15 ministres à temps plein.

 En matière sociale, un ministre suffirait au lieu de cinq. 

Un ministère des Rapatriés a été instauré en 1995, trente-trois ans après la fin de la guerre d’Algérie […].

 Quand je suis nommé secrétaire d’État aux Affaires européennes, je comprends que je dois composer avec quatre autres administrations françaises qui en sont chargées ».

 

Il remarque que « la France est le pays le plus centralisé d’Europe » :

« Pourquoi ne pas donner plus de pouvoirs aux départements et aux régions dans la gestion des écoles, collèges, lycées, universités, hôpitaux ? […]. 

 

Les ARS (agences régionales de santé) devraient être confiées aux régions ; les chefs d’établissement de l’enseignement public devraient recruter eux-mêmes leur personnel enseignant […]. 

En finir avec le droit des préfets sur les projets d’urbanisme menés par les communes ».

Il constate avec effroi qu’il y a 1800 pages pour la réglementation thermique des établissements scolaires, 4300 pages d’instructions aux ARS pour la collecte de données chiffrées, que 40 % du marché locatif privé seront vraisemblablement interdits à la location du fait de leur classement énergétique, que 68 % des élus sont confrontés à des normes contradictoires.

Il a vu que le président de la République passait trop de temps à de trop nombreuses nominations.  L’Élysée est devenu une « agence de casting permanent ».

« Comme secrétaire général de l’Élysée, j’ai consacré beaucoup de temps aux nominations ». 

De nombreuses nominations sont qualifiées par lui de « nominations de circonstance » (des nominations par copinage).

De ce fait la réforme de l’État est négligée.

« Emmanuel Macron n’a pas engagé en 2017 une grande transformation de l’État […]. 

Je n’ai jamais senti chez les quatre derniers présidents de la République le moindre intérêt pour ce sujet pourtant essentiel, la réforme de l’État […]. 

Pendant les trois ans où j’ai été secrétaire général de l’Élysée, jamais le thème de la réforme de l’État n’a été abordé […].

 La simplification est toujours confiée à des membres du gouvernement de second rang ».

Il reproche à la réforme Balladur des retraites en 1993 d’avoir « épargné la fonction publique » ; comme celle de Macron en 2023.

Le titre de son livre illustre le fait que les réformes décidées par le pouvoir politique rencontrent l’obstruction systématique des hauts fonctionnaires, qui détiennent en fait le pouvoir, d’autant plus que les principaux ministres sont issus de leurs rangs, et y retournent après leur carrière politique.

 

Son aveu partiel n’est pas un aveu personnel, mais l’aveu d’une caste

Jean-Pierre Jouyet sait que de profondes réformes sont nécessaires.

Il critique Emmanuel Macron, qui « s’était engagé à baisser de 120 000 les effectifs publics, mais en a créé 120 000 ». 

Il écrit qu’il faut « en finir avec les sureffectifs et les doublons » et qu’« il reste à réduire la masse salariale globale » de la fonction publique.

Il admire les dirigeants de pays qui l’ont réalisé : Paul Martin, premier ministre du Canada, « qui a diminué de 20 % les dépenses publiques canadiennes, et qui a obtenu en dix ans une baisse de ces dépenses de 48,8 % à 37,1 % du PIB canadien » ; Franco Bassanini, ministre italien de la Réforme de l’État, « qui a fait passer le coût du personnel public de 12,6 % du PIB en 1990 à 10,5 % en 2000… et supprimé près de 200 types d’autorisations administratives ».

Il sait que les syndicats sont un frein aux réformes :

« En Italie, les principaux syndicats du secteur public représentent les travailleurs des secteurs public et privé, alors qu’en France ils ne représentent que ceux de l’administration publique ».

 Pour faciliter les réductions d’effectifs, il propose de « renforcer la mobilité entre administrations, développer la polyvalence des agents ».

Il approuve les privatisations de Lionel Jospin (France-Telecom, Renault, etc), qu’il a orchestrées comme directeur de son cabinet et « qui ont fait passer le déficit public à 1,3 % du PIB en 2000 ».

Bref, Jean-Pierre Jouyet connaît les défauts de nos administrations et une partie des remèdes.

 

Pour sortir la France de son déclin économique, il devrait tirer toutes les leçons de ses observations :

  • obliger à la démission de la fonction publique les fonctionnaires entrant en politique ;
  • contrôler les subventions aux syndicats ;
  • privatiser toutes les entreprises publiques, y compris la Caisse des dépôts, la BPI, EDF et SNCF (cf Japon, Royaume-Uni, Italie), ainsi qu’une partie des HLM, hôpitaux, écoles, assurance-maladie ;
  • fixer un objectif de 20 % de baisse des dépenses publiques ;
  • geler les embauches de fonctionnaires, aligner leurs horaires de travail sur ceux des Allemands ;
  • rendre les hauts fonctionnaires responsables de leur gestion devant le Parlement ;
  • règlementer le droit de grève ;
  • décentraliser la gestion de l’Éducation, de la Santé, de la Culture, du Sport, du Tourisme, etc.

 

Bien qu’il prétende que son livre est « une sorte de confession qui met à plat les moyens du redressement », il ne propose presque rien de tout cela. Car des haus fonctionnaires lui diraient :

« Est-ce bien nécessaire ? ».

Son aveu partiel n’est pas un aveu personnel. C’est l’aveu d’une caste.

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Sur le web.     https://www.contrepoints.org/2023/11/27/467655

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