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Démission de Sébastien Lecornu : le chaos français vu de l’étranger

« Le chef de gouvernement le plus éphémère de l’histoire politique française moderne ».
Si Sébastien Lecornu se cherchait une nouvelle bio pour son profil X, le quotidien britannique The Telegraph vient de lui en trouver une bonne.
La démission express de l’ex-Premier ministre a fait les gros titres, outre-Manche, comme dans le reste de l’Europe, où la presse internationale reste sidérée par l’extraordinaire instabilité politique qui perdure dans l’Hexagone.
BREAKING: France’s prime minister Sébastien Lecornu handed his resignation to Emmanuel Macron on Monday after only 27 days in the role
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— The Telegraph (@Telegraph) October 6, 2025
En Italie, le « chaos » français a notamment été critiqué par Il Fatto Quotidiano, qui n’a pas manqué de noter le triste « record » de Sébastien Lecornu, bombardé « Premier ministre le plus éphémère de la Ve République ».
Une performance également soulignée sans pitié par le Corriere della Sera : « Le Premier ministre a été nommé il y a 27 jours, mais est resté seulement 13 heures à la tête du gouvernement.
» En Russie, c’est le tabloïd pro-Kremlin MK qui en a remis une couche, qualifiant le malheureux démissionnaire de « coq autrefois vaillant mais pas à la hauteur »…
Les erreurs de Lecornu
De l’avis général, Sébastien Lecornu porte une grande responsabilité dans la situation actuelle.
Le magazine allemand Der Spiegel estime, ainsi, que le très éphémère Premier ministre a « aggravé » la crise politique en France.
En Suisse, le média Blick note le « triple échec » de ce trentenaire « dont beaucoup louent le talent de négociateur » : l’impossible ouverture au centre gauche, l’absence d’un pacte budgétaire sérieux, l’aveu d’impuissance devant une possible censure du gouvernement.
Encore plus acerbe, Il Fatto Quotidiano reproche à Lecornu d’avoir osé faire appel à Bruno Le Maire.
« Sa nomination a suscité le chaos pour des raisons évidentes : Le Maire a été ministre des Finances d’Emmanuel Macron pendant sept ans avant de devenir le "Monsieur Dette", le premier responsable, aux yeux des Français, de l’énorme dette publique qui pèse sur la France aujourd’hui et qui pousse des centaines de milliers de personnes à protester dans les rues », analyse le quotidien transalpin.
Une opinion partagée par le Telegraph, perplexe devant le retour, au gouvernement de, « l’homme qui a ruiné la France ».
Francia nel caos: anche il nuovo premier Lecornu dà le dimissioni 12 ore dopo aver consegnato la lista dei ministri. La Borsa precipitahttps://t.co/CSAbgUWDtu
— Il Fatto Quotidiano (@fattoquotidiano) October 6, 2025
À ce sujet — Sébastien Lecornu a démissionné
Si certains, en France, semblent s’amuser d’une actualité politique qui tourne parfois au vaudeville, ce n’est pas le cas de nos confrères étrangers. La presse internationale se montre en réalité très inquiète pour nous. « Peu d’investisseurs internationaux vont vouloir s’engager dans un pays en proie au chaos politique », redoute le quotidien suédois Svenska Dagbladet. « Le ratio dette/PIB de la France est désormais le troisième plus élevé de l’Union européenne, après la Grèce et l’Italie, et avoisine le double du seuil de 60 % autorisé par les règles européennes », rappelle le Telegraph, tandis que le média portugais Público diagnostique une « profonde crise de régime » en France. Tous notent, au passage, que la Bourse de Paris a chuté de près de 2 %, lundi vers 9 heures, juste après l'annonce de la démission de Sébastien Lecornu…
Emmanuel Macron sur la sellette
Enfin, la presse européenne semble unanime sur le cas d’Emmanuel Macron dont les jours à l’Élysée pourraient bien être comptés.
« Le Président Macron est un canard boiteux à court d’options », tranche le Times.
« Charles de Gaulle n’aurait pas imaginé que l’un de ses successeurs à l’Élysée ne serait plus capable de gouverner, même à moitié », ajoute le journal autrichien Der Standard.
« Emmanuel Macron, plombé par son impopularité record (il n’a plus que 17 % d’opinions favorables), est devenu toxique », renchérit Blick.
De son côté, le Telegraph avance que « la démission de Sébastien Lecornu pourrait mettre définitivement fin au calvaire politique du Président français »…
Et au nôtre, aussi ?
ET AUSSI

La démission de Sébastien Lecornu est un coup de tonnerre dans un ciel déjà bien chargé.
Elle n’est pas seulement un épisode de plus dans la longue série des crises gouvernementales sous Emmanuel Macron : elle crée une situation politique inédite, presque ubuesque.
Le chef de l’État se retrouve sans majorité stable, sans ministre de la Défense en situation de pré-guerre (paraît-il) et sans cap politique clair. On me dira que cela ne change guère de la situation précédente.
C’est vrai, mais il est visible que Sébastien Lecornu était le dernier fusible de la Macronie, le dernier Premier ministre à pouvoir tenter de protéger le chef de l’État. Son départ marque, en fait, la fin du macronisme : le président de la République n’est plus en état de nommer un Premier ministre.
C’est à cela que l’on mesure la différence entre la légalité du pouvoir et sa légitimité : Macron pourrait nommer un nouveau Premier ministre parce que la Constitution lui en donne le droit, mais il a perdu toute l’autorité que le droit lui donne. C’est de cette situation nouvelle qu’il faut tirer toutes les conséquences.
Retourner devant les électeurs : la seule issue raisonnable
Dans ce g
rand théâtre de la Ve République fatiguée, la seule issue raisonnable consiste à retourner devant les électeurs, comme beaucoup le disent aujourd’hui. Mais encore faut-il savoir comment s’y prendre.
Car la Constitution ne laisse pas mille options.
Elle en offre deux, et deux seulement : soit Emmanuel Macron part, soit il dissout l’Assemblée nationale. C’est aussi simple – et aussi grave – que cela.
On entend beaucoup qu’une dissolution permettrait de « clarifier la situation ». Comme si un passage aux urnes pouvait, par miracle, rendre cohérent un paysage politique éclaté, où plus personne ne se comprend et dans lequel les alliances changent d’un micro à l’autre.
On nous promet qu’un nouveau scrutin permettrait d’obtenir une majorité claire. C’est avoir grande foi dans le dieu Hasard…
Car enfin, qu’est-ce qui nous garantit qu’une nouvelle Assemblée serait différente de celle que nous connaissons aujourd’hui ? Rien. Absolument rien.
La France est fracturée, les blocs sont figés et les électeurs, lassés, pourraient bien reconduire la même configuration – ou, pire, plonger le pays dans une instabilité encore plus grande. Dissoudre, dans ces conditions, ce serait un peu comme jouer les institutions à la roulette russe, avec un barillet plein.
Reste donc l’autre solution : le départ d’Emmanuel Macron. Qu’il s’agisse d’une démission ou d’une destitution, peu importe, au fond, la mécanique juridique : c’est le résultat qui compte. Le Président, enfermé dans sa tour élyséenne, semble persuadé que tenir coûte que coûte, c’est gouverner. C’est, au contraire, prolonger le chaos, celui qu’il prétend éviter.
On nous dit : « Ce serait le désordre absolu ! » Ah bon ? Et ce que nous vivons, qu’est-ce donc ? Les ministres qui défilent plus vite que les trains, une Assemblée ingouvernable, un peuple découragé, un État à bout de souffle… Si ce n’est pas le chaos, c’est au moins son avant-goût.
La Constitution n’a jamais été conçue pour servir de camisole
On nous dit encore : « Il faut respecter les institutions. Le Président a été élu pour cinq ans. » Certes. Mais la Constitution n’a jamais été conçue pour servir de camisole. Elle existe pour garantir la stabilité du pays, non pour enfermer les Français dans un quinquennat d’impuissance. Respecter les institutions, c’est aussi savoir s’en servir à bon escient – et, quand la situation l’exige, savoir en sortir par le haut. Quant à imaginer qu’il faudrait vivre encore dix-huit mois dans un tel désordre, sous l’égide d’un président de la République qui serait réduit à empêcher toute ce qu’il n’aime pas…
Le vrai courage politique n’est pas de s’accrocher au pouvoir en espérant que l’orage passe. Il est de reconnaître quand la confiance nationale est
rompue. La France ne peut pas vivre éternellement dans cet entre-deux, suspendue entre un Président déconsidéré et un Parlement impuissant. Elle mérite un nouveau souffle, un nouveau départ.
Il ne s’agit pas de vengeance, encore moins de déstabilisation. Il s’agit de lucidité. Emmanuel Macron est, aujourd’hui, un Président sans appui, sans élan, sans projet. Le pays ne peut pas rester indéfiniment paralysé pour satisfaire à l’orgueil d’un seul homme. L’Histoire de France a souvent montré que les grandes sorties de crise ne naissaient pas de la ruse mais du renoncement courageux.
Quitter le pouvoir peut être un acte de service. Et puisque la dissolution ne résoudrait rien, il ne reste qu’une voie, étroite mais claire : le départ du président de la République.
Ce ne serait pas installer le chaos, ce serait se donner les moyens de la délivrance.

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