Xavier Raufer : « Monsieur Retailleau, ne laissez pas tricher le ministère de l’Intérieur »

À quand les résultats ? Les présents ministres de l’Intérieur et de la Justice veulent-ils épater tout le monde ?
Par Xavier Raufer.
Cette nouvelle contribution de Xavier Raufer est parue sur Atlantico hier, 15 février.
Intéressante analyse que nous ne commenterons pas sauf pour dire qu’elle émane d’un spécialiste très avisé dont nous suivons les travaux depuis des années.
Les chiffres de la délinquance qui viennent d’être publiés par le ministère de l’Intérieur reflètent mal la réalité criminelle du terrain.
Une fois encore, les chiffres « de la délinquance » récemment publiés par le service statistique du ministère de l’Intérieur sont confus, peu sincères et reflètent mal la réalité criminelle du terrain.
Preuve avec les cambriolages, coups et blessures volontaires, homicides et tentatives, vols avec armes ; chiffres que l’Intérieur collecte à l’état brut, mais trafique avant publication.
Cambriolages
L’ÉTAT 4001, système de comptage des infractions du ministère de l’Intérieur, compte 4 index consacrés aux cambriolages, cauchemar sécuritaire des Français :
– résidences principales ;
– résidences secondaires ;
– locaux industriels, commerciaux et financiers ;
– autres lieux (hangars agricoles, etc.).
Depuis les confinements, etc., de l’ère COVID (2020-2021), la population sort moins, télétravaille, etc. ; d’où, les cambriolages hors « résidences principales » augmentent.
Aussi, par économie d’énergie, les rues sont moins éclairées, aveuglant les caméras de vidéosurveillance. Exemple : Paris + Petite couronne, comparaison de 2020 (confinement) sur 2019, cambriolages de logements, moins 23% ; autres cambriolages, plus 40%. Pareil dans le département du Nord : cambriolages de logements, -19% ; autres cambriolages, +28%, etc.
Or l’Intérieur qui bien sûr, connaît tous ces chiffres, ne publie que ceux des « résidences principales », occultant le reste.
Revenons au cas précédent : fin 2021 (après l’épisode COVID), l’Intérieur publie la seule ligne « cambriolages de logements » et claironne que les effractions baissent !
En fait, si l’Intérieur annonce cent cambriolages, il y en 140 minimum.
Preuve, avec des chiffres camouflés aux Français, le bilan réel des cambriolages en France en 2024.
Chiffre avoué par l’Intérieur (« résidences principales ») 218 700 cambriolages ; plus ceux qu’il censure (autres index, désormais ± 50% de l’ensemble) ± 109 350.
Total des cambriolages recensés par l’Intérieur, ± 328 050.
Or, Beauvau ne les connaît pas tous, tout cambriolé ne portant pas plainte.
Un « chiffre noir » estimé par les « Enquêtes de victimation » du ministère de l’Intérieur à 44% des victimes, ± 144 342 cambriolages.
Total des effractions vraiment subies par les Français en 2024, dans quelque local que ce soit ; déclarées ou non, ± 472 392.
1 294 cambriolages par jour, ± 54 par heure (presque un par minute).
Telle est l’ampleur du camouflage/mensonge de l’Intérieur.
Coups et blessures volontaires (C&BV)
Les C&BV du cadre familial sont spécifiques : ivrognerie, scènes de ménage, etc. ; pas vraiment d’enquête, les protagonistes habitent ensemble, etc. ; ces (parfois graves) violences physiques doivent d’autant plus être présentées à part que leur prévention et régulation échappent pour l’essentiel aux forces de l’ordre : comment les éviter ?
Mettre un policier dans chaque salon ?
Restent les C&BV hors famille, eux traumatisants pour la population car commis sur la voie publique, dans les transports, lieux d’enseignement ou alentours.
En français commun, un quidam se fait « casser la figure » dans son quartier.
En 2024, 143 800 C&BV hors-famille connus des autorités ; prenons les années de 2018 à 2024, celles, pleines, de la présidence Macron : 2023, 143 200 ; 2022, 143 000 ; 2021, 127 400 ; 2020, 119 800 ; 2019, 131 500 ; 2018, 130 700.
Sur sept ans complets, ces C&VB augmentent de 10%, sans baisser une seule fois. Mais il y a pire.
Homicides et tentatives
Comme déjà expliqué dix fois dans Atlantico, depuis la généralisation de la médecine d’urgence (SAMU et SMUR), décompter justement les homicides volontaires exige d’agréger les aboutis (morts) aux tentatives (blessés).
Car chaque année un peu plus, en mode vases communicants, les progrès de la médecine de terrain transfèrent la colonne « morts » dans celle « blessés sérieux ».
En 2024, on en a ainsi 5 285, connus des autorités.
Années-Macron : (2023), 5 011 ; (2022), 4 543 ; (2021), 4 018 ; (2020), 3 938 ; (2019), 3 575 ; (2018), 3 313. 2018-2024 : homicides et tentatives, on a ainsi l’effrayant total de + 59% en huit ans, (bien : plus cinquante-neuf pour cent), chiffre de loin le pire depuis le début du siècle.
Vols avec armes : l’art délicat de l' »évaporation »
Lisons ce rapport de l’assemblée nationale [1] : « 19 index regroupent chacun une liste précise de natures d’infractions, NATINF.
Lors de l’enregistrement d’un fait de délinquance dans le logiciel de rédaction de procédure par la police ou la gendarmerie, l’enquêteur saisit une NATINF mais c’est sa hiérarchie qui assume le choix de l’indexation.
A la clôture de l’enquête, le magistrat de permanence confirme la NATINF choisie à l’enregistrement du fait.
C’est alors que la NATINF et l’indexation sont saisies dans la base de données utilisée pour établir les statistiques« .
Ainsi, un commissaire ou un officier gendarme peut à volonté transformer un « vol avec arme » (crime) en « vol aggravé » (délit) : dans la statistique, un braquage de moins – et un anodin vol de plus.
Maintenant : un ministre de l’Intérieur aux statistiques inquiétantes… une justice impécunieuse (Un procès d’assises coûte jusqu’à 600 000€ …) : changeons la carpe en lapin… discrète pression sur les hiérarchies pour que de réels crimes (braquages) deviennent de statistiquement futiles délits.
Ce qui permet de proclamer une factice « baisse des braquages ». ■
Par XAVIER RAUFER
[1] Pour les définitions, NATINF, etc., voir http://www.justice.gouv.fr/bulletin-officiel/dacg74f.htm.
Xavier Raufer
Docteur en géopolitique et criminologue.
Il enseigne dans les universités Panthéon-Assas (Paris II), George Mason (Washington DC) et Université de Sciences politiques et de droit (Pékin)
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Céline Pina : Elias n’aura jamais 15 ans

Victime d’un barbare à machette et de l’inaction de la justice
Par Céline Pina.
Cet article est paru dans Causeur le 14 février.
Il se passe de tout commentaire supplémentaire.
Sauf que l’AFP (rebaptisée Agence Française de Propagande par Mathieu Bock-Côté) devrait être poursuivie pour falsification de la vérité, mensonge et dissimulation.
Sauf, en outre, que le régime, désormais incapable d’assurer la sécurité des Français, y compris des enfants, a perdu toute apparence de légitimité.
Tôt ou tard, avec plus ou moins de chances de faire le bon choix, la France entrera en quête d’une nouvelle légitimité, comme elle l’avait fait en 1958 en rappelant de Gaulle.
Ce dernier, enjambant la IVe République, avait alors parlé de « la légitimité nationale que j’incarne depuis vingt ans ».
En effet, la légitimité ne se confond pas avec la légalité. Elle est d’un ordre supérieur, qui vient des origines et de l’Histoire.
Elias, 14 ans, n’est jamais rentré de son entrainement de foot.
Il décédait le 25 janvier après une agression au couteau dans le 14e arrondissement de Paris.
Dans une lettre, ses parents estiment qu’il ne s’agit en rien d’un fait divers et en disent plus sur l’arme du crime passée sous silence par les institutions et les médias.
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