« Des résultats exécrables et qui s’aggravent d’année en année. »
Par Xavier Raufer.
Cette « contribution » de Xavier Raufer est parue sur Atlantico le
12 mai.
Intéressante analyse que nous ne commenterons pas sauf pour
dire qu’elle émane d’un spécialiste très avisé dont nous suivons les
travaux depuis des années.
Le
2 août 2024, le prudent Figaro constate qu’en général, sous la
présidence Macron, anarchistes et casseurs souffrent peu de la justice ;
rarement jugés – moins encore condamnés.
En
août 2024, le Parquet national antiterroriste a 5 procédures en cours
ciblant l’ultradroite ; zéro contre l’ultragauche, les écoterroristes,
etc.
Le Figaro cite un magistrat : « Les peines infligées sont …
sans doute moins sévères quand il s’agit de l’ultragauche que de
l’ultradroite ».
C’est fort juste :
– Émeutes de l’été 2023 à Bordeaux :
agences bancaires ravagées, DAB détruits, vitrines fracassées,
incendies par dizaines, mobilier urbain saccagé, jets de
cocktails-Molotov sur la police ; des centaines d’émeutiers, chacun des
cinq jours de violences déchainées.
À la fin, 7 condamnés pour zéro jour
de prison réelle ; au pire, 30 mois avec sursis… les autres, 105 heures
de travail d’intérêt général, interdiction de manifester pendant trois
ans.
Décembre 2023, Bouches-du-Rhône, ravage de la
cimenterie Lafarge par des écolos violents, 6 millions d’€ de dégâts.
Dans ce cas, le code pénal prévoit dix ans de prison : (attaque en bande
organisée avec armes et séquestration).
Verdict en décembre 2024, zéro
jour de prison réelle : 9 arrêtés, 5 relaxés, 4 « condamnés » avec
sursis, de six à dix mois.
Encore, là, a-t-on envoyé divers
lampistes devant un tribunal ; parfois c’est l’échec total, pour du
terrorisme ou des atteintes aux intérêts majeurs de l’État.
Des années
après qu’ils aient été commis, brouillard complet ; nul n’est traduit en
justice.
Rappel : la SNCF contrôle environ 36 000 km de voies
ferrées, dont la surveillance lui coûte 35 millions d’€/an ; 250 de ses
agents sont affectés à cette sûreté ferroviaire.
En janvier 2023, à
Vaires-sur-Marne (77), un poste d’aiguillage SNCF est incendié, le
trafic ferroviaire de la gare de l’Est, paralysé 48h.
Depuis, nulle
arrestation. Avant cela (2021-2023), des installations des Télécom ont
subi 205 sabotages, incendies, etc.
De mars 2020 à février 2022,
massivement, 250 attaques de pylônes de téléphonie, antennes-relais et
sites de cibles symboliques pour l’ultra-gauche.Publicité
A l’aube
du 26 juillet 2024, peu avant la cérémonie d’ouverture des Jeux
Olympiques, divers postes d’aiguillage stratégiques de la SNCF subissent
une « attaque massive, de nature à paralyser le réseau ferré national »
et « à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation » –
800 000 voyageurs impactés. But politique d’une attaque clairement
terroriste : couper Paris de toutes les Lignes à Grande Vitesse (LGV).
D’emblée, on cible les « anarcho-autonomes… l’écologie radicale ». Le
26/07/2024, 4h du matin, vaste série de sabotages : LVG-Nord,
Pas-de-Calais ; LVG-Est, Meurthe-et-Moselle ; LVG-Atlantique,
Eure-et-Loir ; un acte déjoué sur la LVG Paris-Lyon.
Visées, de
névralgiques armoires électriques, pourtant sécurisées et dissimulées ;
les saboteurs coupent et incendient les câbles contenant des faisceaux
de fibres optiques.
Le surlendemain, une revendication
oblique-ironique dont l’ultragauche est coutumière : l’action vise à
« La chute d’un monde reposant sur l’exploitation et la domination ».
Les enquêteurs gémissent : « Les pirates du rail n’ont commis aucune
imprudence »… disposent « d’un solide savoir-faire dans la pratique de
la clandestinité »… d’une « parfaite connaissance des structures » (de
la SNCF) …
L’attaque est « très pertinente, là où ça fait le plus mal »…
Les mêmes suggèrent « Des fuites de données de la SNCF, ou des
complicités en son sein »…
Trois jours après ces actes graves, le
réseau numérique national longue-distance (« autoroutes de
l’information ») est frappé, de 1h à 3h du matin.
Bien renseignés et
équipés, coordonnés en équipes, des saboteurs sectionnent, à la hache ou
à la disqueuse, de gros câbles haut-débit de fibre optique (dits « Backbone« )
de Free, SFR, etc. ; ce, dans huit lieux : Meuse (Contrisson), Hérault
(Capestang) Oise (Catigny-Béthancourt), Bouches-du-Rhône (Le Rove,
L’Estaque) ; aussi, dans la Drôme, Saône-et-Loire, Seine-et-Marne et
Essonne.
En masse, des clients de la téléphonie fixe et mobile sont
touchés.
L’Intérieur vise des « groupuscules anarchistes violents…
mouvance radicale… promoteurs de l’action directe », éprouvant la
« jouissance du chaos » ; pour la Sous-direction antiterroriste, cette
« nébuleuse » a « une parfaite connaissance des infrastructures
attaquées », voire des « complicités à la SNCF ».
Le 27 juillet, M.
Darmanin, ministre de l’Intérieur avance « On saura assez rapidement qui
est responsable ».
Dix mois ont passé depuis ces galéjades ; 29
mois, depuis le grave sabotage ayant paralysé la gare de l’Est. Où en
est l’enquête ?
On ne sait rien – sauf ceci : pour les attaques de
prisons, des graffiti, tirs de mortiers et rafales sur des portes, ont illico mobilisé
le Parquet national antiterroriste ; rien de tel pour le gravissime,
coordonné et organisé sabotage de nos réseaux majeurs ; numériques (« backbones« ) ou physiques (SNCF). Qu’une nation étrangère en fasse la moitié, c’est le casus belli.
Là, pas d’investigation pour terrorisme et une enquête enlisée. ■
Dès le 20 avril 2025, divers journaux et sites (Le Figaro, Dernières Nouvelles d’Alsace, Causeur, Le Dauphiné, Le Progrès,
etc.) faisaient état d’un sondage évoquant, une fois encore, l’opinion
très négative des Français à l’égard de leur Justice.
Si le résultat est
tristement édifiant, la formule reprise dans tous les médias est
curieuse : « Le Conseil national des barreaux (CNB) vient de
finaliser, avec l’IFOP, un sondage sur la confiance des Français dans la
Justice. »
Or, il est impossible de trouver trace de ce sondage et
de sa méthode, ni sur le site du CNB, ni sur celui de l’IFOP.
L’auteur
de ces lignes a écrit plusieurs fois aux deux organismes concernés.
Mutisme : le sondage a disparu !
Pour les lecteurs qui ne le sauraient pas, le CNB, qui a commandité
ce sondage, est l'organisme national qui représente les 75.000 avocats
inscrits dans un des 164 barreaux français : une forte représentativité,
mais une voix en général discrète et mesurée. Interlocuteur des
pouvoirs publics, le CNB participe à l'élaboration des règles
professionnelles et il intervient aussi sur les questions relatives au
droit et à l'institution judiciaire.
Toutefois, il existe désormais une
guerre au grand jour de certains magistrats contre les avocats (ce qui
est déplorable) et le CNB a réagi par une résolution de son assemblée générale du 17 janvier 2025 « dénonçant des attaques inacceptables (et ouvertes, de quelques juges) à l’encontre de la profession d’avocat ». Ambiance...
Seulement 48 % des citoyens font encore confiance à la Justice française
Que révélait, selon les médias, le sondage disparu ?
Que seulement 48
% des citoyens font encore confiance à la Justice française. Or, ce
sondage n’est pas le premier mauvais sondage sur la Justice.
Déjà en
juillet 2022, 73 % des personnes interrogées par l’IFOP estimaient que « la Justice fonctionne mal »,
rejoignant les constatations du rapport de Jean-Marc Sauvé, en
conclusion des États généraux de la Justice lancés en novembre 2021 par
Emmanuel Macron.
Ils n’étaient que 37 %, avant l’arrivée au pouvoir
d’Emmanuel Macron, mais en novembre 2024, selon un sondage CSA pour Europe 1, CNews et le JDD, 65 % des Français
pensaient que la Justice est partiale.
Après le sondage d’avril 2025,
la présidente du CNB, Me Julie Couturier, a déclaré que la confiance des
Français en leur Justice est historiquement basse et « s’est
totalement effondrée depuis 2008, quand 63 % des citoyens déclaraient
lui faire confiance, pour atteindre aujourd’hui péniblement 48 % ». Soit une chute de 15 points en 17 ans.
Les réactions des tenants du système
Alors que le sondage n’a toujours pas été rendu public (le sera-t-il
un jour ?), les prises de position officielles se succèdent.
Les Dernières Nouvelles d’Alsace
rapportent les propos de Christophe Soulard, Premier président de la
Cour de cassation, pour qui tout ne serait qu’une question de « pédagogie » (sic) pour faire évoluer les mentalités sur le fonctionnement de l’institution : « De plus en plus d’efforts sont réalisés pour expliquer les décisions de justice », sans pour autant « se faire trop d’illusion sur la pédagogie » (sic).
Dans Le Dauphiné libéré, c’est Mme Guigou, ancien garde des Sceaux, qui monte en ligne. On nous fait savoir que la «
montée du populisme en France annihilerait toute réflexion en
profondeur et volonté de comprendre la complexité du système judiciaire
(sic), car contrairement au peuple souverain, les magistrats n’auraient
aucune légitimité ».
Membre du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), l’ex-ministre socialiste ajoute : «
Cette idée de "gouvernement des juges" est une fable, sauf qu’elle
prend aujourd’hui dans des milieux qui devraient résister. »
Mme
Guigou n’est pas juriste mais elle contredit ce que publient, depuis des
années, plusieurs renommés professeurs de droit à l’université.
Pour
elle, « la démocratie, ce n’est pas seulement le vote. Tous les
dictateurs et autocrates sont élus. La démocratie, c’est l’État de
droit. Il nous protège contre l’arbitraire. »
L’État de droit certes, mais le sujet du sondage était : est-ce que la Justice en est encore garante ?
Pourquoi tout cela est-il gravissime ?
Les maux de la Justice sont perçus par tous, citoyens et acteurs
judiciaires : laxisme pour certains délinquants et politisation de
certains magistrats (affaire du « mur des cons », condamnations perçues
comme éliminatrices contre certains politiques) ; et parfois même la
corruption : magistrats et avocats honnêtes le savent bien.
Même si on
admettait la thèse de Mme Guigou, la simple perte de confiance dans
l’État de droit est un mal mortel pour une société.
Par-delà le baratin,
il faudra en guérir au plus vite la République par des gestes
institutionnels très forts, comme cela a été fait en d’autres pays
(ainsi au Canada).
Car « toute société dans laquelle la garantie des
droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a
point de Constitution » (Déclaration des droits de l’homme et du
citoyen, art. 16).
La dégradation de la démocratie en continu,
l’explosion de la société sont inévitables et nul ne peut en prévoir
l’ampleur : « Il est essentiel que les droits de l'homme soient
protégés par un régime de droit pour que l'homme ne soit pas contraint,
en suprême recours, à la révolte contre la tyrannie et l'oppression » (Déclaration universelle, ONU, 1948) : l’injustice de la Justice est une cause de révolution.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire